Triple boucles d’oreille et bagues en argent, le gavroche moderne est originaire d’Aix-en-Provence, et il a troqué ses guenilles pour un jean et des Doc Martens. Le Romain humain joue avec les mots et les humeurs, au contact de ceux qui apprécient son travail, le Romain Humeau, depuis quelques années figure incontournable du rock français, fait le bonheur des arts ouïs et des ahuris. Et parce que le temps qui passe le fait flipper, parce que pour lui la mort doit être crainte à partir du moment où elle ne donne pas sens à la vie, il profite de chaque seconde, comme si chaque instant offrait son éternité.

Ainsi, quand Eiffel décide de faire un break en 2004, Romain compose et enregistre un album solo. Le break c’est la musique, encore et toujours. Des notes et les mots dans la peau, L’éternité de l’instant sort en 2005. Un album représentatif de l’éventail des styles et des instruments maitrisés (batterie, piano, violon, banjo). Rock pur (S’enflammer, Je m’en irai toujours) ou slow (Toi, Une vie invisible), électrique ou acoustique, l’artiste aux favoris confirme qu’il est lui-même un des favoris. Il impose son caractère ouvert et empathique avec Prends ma main, une ode à la nécessité de l’autre, « On a toujours de la solitude. Mais on peut la partager… Il y a plein de moyens d’aller vers l’autre. Moi j’ai que la musique. J’ai que la parole.« .

Sans avoir le coffre (tant thoracique que bancaire) d’un Russel Allen, la bonne gueule se permet pourtant des envolées vocales envoyant les potentiomètres à saturation (on se souviendra toujours du concert aux Eurocks en 2003 et le finish de Hype).

Peut-être un peu plus sombres, les compositions du Romain tout seul ont cette pincée de saveur lyrique et intimiste (Tu restes mon ami, Sans faire exprès) qu’on retrouve moins souvent dans les chansons jouées avec Eiffel. Et l’homme transpire la sincérité. Et la modestie. Il est peut-être autant utile de faire une interview pour un grand média que de laisser un article « Journal de bord » sur le site internet, à destination des Humeains.

Romain effectue plusieurs collaborations avec des artistes de sa trempe, Noir Désir en 2001 et 2008 (Des visages des figures, Le temps des cerises), Dominique A en 2002 (Les enfants du Pirée), les Têtes Raides en 2005 (L’oraison), entre autres.

Tempérament bosseur et exigeant avec lui-même, Romain ne se permet la moindre fausse note, soigne ses sons, et est fervent partisan du dépassement de soi : « T’es en lutte avec toi -même, t’es énervé. L’idée c’est d’aller chercher plus loin, pour se sentir grandi. Se fatiguer, pas dormir pour aller plus loin dans ce que tu veux, ce que tu penses, ce que tu sens. Avec un petit côté romantique qui est l’idée de s’enflammer. Je sais que c’est pas l’époque, mais je m’en branle. »

On s’en branle que ça soit pas l’époque.

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