C’est sous le soleil du dernier jour de Couvre Feu que nous rencontrons deux membres du groupe Shaka Ponk, et pas les moindre car ce sont eux, Ion et Samaha, qui prêtent leurs visages à la pochette du dernier album du groupe. Planning serré oblige, on a partagé l’interview avec les sympathiques représentants du zine Vibraphonyx qui ont publié l’interview en audio. Si vous êtes curieux d’entendre la voix de Samaha et Ion, vous pouvez donc les écouter sur leur site.

D’où vient le nom du groupe ?

Samaha : C’est une histoire assez marrante. Il y a quelques années, mais on fait comme si ça ne faisait pas longtemps, parce que quelque part on a la sensation d’être très très jeune, on cherchait un nom de groupe. Frah nous a dit que Shaka Ponk ça taperait, mais que c’était dommage que ça soit pris. Il nous a convaincu que c’était pris, donc nous on disait « bah ouais c’est con ! ». Au final, on a pris la décision de vérifier sur internet, et on s’est rendu compte que ça n’existait pas, alors qu’on était convaincu du contraire, donc on a sauté dessus. C’est un peu après qu’on a trouvé le sens, et ça nous correspondait bien. Shaka c’est le premier moine bouddhiste qui est venu au Japon, donc c’est un peu le côté zen, la protection de la nature, etc. Et Ponk, c’est le côté rock, la scène, le côté plus énervé, qui nous correspond aussi.

Ion : C’est le son ! Les textes restent zen, et le son c’est un peu punk !

Comment vous vous êtes rencontrés ?

Ion : Bande de potes, et potes des potes. Avant que le groupe existe, on avait l’habitude de se réunir pour faire la fête, et pour s’amuser à boeufer, à jammer, plutôt en vidéo qu’en son. C’est à dire qu’on se retrouvait dans des appart’ où on squattait un peu tous. On est une bande de graphistes et de musiciens. On rebondissait sur les images des uns et des autres. Des fois, on avait des belles images et on se disait « Tiens, je vais mettre du son là-dessus ». Puis, un jour on s’est dit « allez pourquoi pas faire Shaka Ponk !».

Sur le premier album, Samaha était présente dans le groupe mais pas sur scène, donc comment s’est décidée cette apparition lors des concerts ?

Ion : Il y a eu une grosse négociation.

Samaha : Une grosse négociation, car avant, j’acceptais de poser mes voix, et ils les trafiquaient.

Ion : On allait boire des coups, et en échange elle posait sa voix.

Samaha : J’aime bien le graphisme aussi, donc je bossais avec eux. A un moment donné, ça commençait un peu à grossir, et là je me suis dit qu’il y avait peut être un moyen de me faire de la tune (rires). J’ai donc commencé aux Victoires de la Musique, et là, vraiment par pur intérêt, je me suis dit qu’il y avait moyen d’être une star et de gagner beaucoup d’argent. Ils ont essayé mainte fois de se débarrasser de moi mais ils n’y arrivent pas. Je me colle au bus.

Ion : En fait, pendant les deux albums précédents, avant que Sam soit avec nous, elle venait en studio régulièrement pour poser des petits bouts de voix, mais elle écrivait plein d’autres trucs qu’on ne pouvait pas mettre, parce qu’après on ne savait pas comment faire sur scène. On n’arriverait pas à le faire comme elle, donc c’était un peu frustrant. Quand on a enfin pu l’emmener avec nous sur scène…

Samaha : On était enfin réunis ! Je suis hyper contente !

Ion : Par contre, elle est toujours aussi pauvre, malheureusement. (rires)

Samaha : Ouais, je me sens un peu arnaquée mais ça ce n’est pas grave ! On me l’a un peu fait à l’envers.

La sortie de votre dernier album s’est bien déroulée ?

Ion : Ouais. En fait, on ne se pose pas trop de questions quand on fait les albums. On ne se demande pas comment les gens vont l’accueillir, mais on essaie juste de ne pas trop refaire ce qu’on a déjà fait. Par exemple, Bad porn, l’album d’avant, pour nous il a bien marché. On aurait pu prendre des titres déjà créés, et les remettre sur le disque, mais on aime bien se mettre en galère et aller là où on ne nous attend pas. En plus, cet album s’est fait dans des circonstances un peu différentes. C’est vraiment à la veille de la sortie qu’on s’est dit « Olala, comment ça va réagir à tout ça ? ». Et trois mois après, il y a eu pas mal de concerts, et on est très content.

Samaha : Il y a des pour et des contre. Il y a ceux qui veulent qu’on fasse exactement la même chose qu’avant, et les contents. Mais, on fait ce qu’on aime.

Comme c’est un peu d’actualité, qu’est ce que vous pensez de l’industrie du disque, des téléchargements illégaux, etc ?

Ion : Moi je n’en pense que du bien. Je ne sais pas s’il faut encourager les gens à être délinquants et à pirater la musique, car effectivement c’est du vol, mais moi, je l’ai fait aussi. J’en suis pas fier mais je l’ai fait. Je pense que ça a donné un coup de pied dans ce système. Ça laissait très peu de place à des jeunes artistes qui essayait d’y arriver.

Samaha : Ça a permis de démocratiser la musique, c’est à dire qu’avant il fallait vraiment signer dans une maison de disque pour être connus et pour vendre des albums. Aujourd’hui, on peut avoir des sites comme Myspace, qui permettent à des jeunes de se dire « tiens on va faire de la musique et on va se faire connaître sans avoir à passer par un label ». Il y a évidemment des maisons de disque que je respecte. Mais ils avaient un peu les tout pouvoirs, et ça c’est un peu énervant. Il y a des groupes émergeants qu’on n’aurait jamais pu connaître avant, et qui n’auraient peut être jamais été signés, parce que justement ils n’entraient pas dans le créneaux de la maison de disque et qu’ils n’avaient pas le format radio. Grâce à ça, on a pu se faire connaître.

Ion : Si je peux ajouter, la musique s’écoute depuis la nuit des temps, et la commercialisation des galettes existe depuis quelques dizaines d’années, 40-50 ans. Je pense que ça allait contre l’art, contre la création et contre l’évolution de la musique. Le piratage et internet était vraiment une super issue de secours, et je pense que la musique continuera, mais que les disques, on n’en entendra plus parler d’ici quelques années.

On peut penser aussi à Radiohead, qui ont fait un téléchargement de leur album à un prix variable.

Ion : Ils se sont fait plus de pognons avec ce disque là, qu’avec tous les autres disques qu’ils avaient vendus réunis. Je trouve ça génial, la démarche. Par contre, il faut s’appeler Radiohead pour pouvoir faire ça.

Shaka Ponk, c’est également l’activisme, et un combat pour l’écologie…

Ion : On ne se définit pas vraiment comme activistes, le singe l’est beaucoup plus que nous, mais en tout cas, on est concernés. On se sent concernés par tout ça, par ces problèmes, car ça devient un vrai problème. Mais ce n’est pas nous qui avons mis ce sujet sur le tapis dans Shaka, même si le groupe est né à Berlin, plus ou moins, car dès qu’on a décidé de monter Shaka, on est parti là-bas. Et là-bas, on a pris une claque, car ils étaient vraiment très loin devant nous. Comme on écrivait pas nos textes à l’époque, on composait les titres et on faisait écrire nos textes par des gens qu’on rencontrait dans la rue, dans les soirées, dans les concerts, etc. Ils étaient pas très chaud au début, et en les poussant un petit peu, on arrivait à avoir des bouts de phrase. D’ailleurs c’était souvent des étrangers à Berlin comme nous, donc personne ne parlait allemand, et c’est ce qui a donné cette langue un peu mélangée avec des mots espagnols, des mots allemands, des mots de français, sur une base d’anglais. Ces gens là parlaient, quasiment à chaque fois d’écologie. Je vous mens, des fois, il y avait aussi des histoire de cul et d’amour.

Samaha : Les gens se rendaient compte qu’ils étaient vraiment concernés, et qu’ils avaient une réelle peur par rapport à la Terre. C’est intéressant, pour nous aussi, d’être un peu le porte-parole des gens, par l’intermédiaire de Goz.

Vous êtes un peu donneurs de leçons…

Ion : C’est le singe, ce n’est pas nous ! (rires)

Samaha : c’est pour ça qu’on a choisi un singe un peu ludique, rock’n’roll. On a envie de partager une idée qui nous tient à cœur, justement sans avoir trop à donner de leçon. On est touché par le sujet, et je pense que tout le monde devrait l’être, parce que ça concerne tout le monde. On devrait avoir une formation sur l’écologie à l’école.

Ion : On sait très bien qu’on changera pas le monde, mais si quelques personnes après le concert de Shaka se remettent en question, c’est cool. Je ne sais pas s’ils comprennent tout en live (rires).

Pour le prochain album, cette idée d’écologie restera dans vos textes ?

Ion : A Berlin, on s’est vraiment rendus compte que tout le monde se sentait concerné par ce sujet-là. En France, on est vraiment en retard là-dessus, et j’ai l’impression, à l’inverse, que les gens sont plutôt des victimes. Nous aussi, ça peut nous arriver ce genre de comportement, en se disant que c’est la faute du voisin, ou de l’Etat, ou du Gouvernement, qui ne fait rien pour améliorer tout ça. Mais je pense que personne ne pourra rien pour ça, à part nous-même. On est encore loin d’avoir gagné ce combat, donc ça nous concerne toujours autant.

Samaha : Ils faut tous se responsabiliser. Il faut arrêter de compter sur l’Etat ou les politiques pour changer les choses. C’est un peu facile d’accuser toujours au dessus de nous.

Vous créez une ambiance par album, qu’est ce que vous avez voulu faire passer sur le dernier album ?

Ion : Dans le dernier album, la première idée était vieille science fiction, fifties. On était parti sur des images et des vidéos, et le son a suivi. Il y a des couleurs un peu rétro qu’on modernisait et des bits, des rythmiques un peu rétro également. On a fait ça sur la route. Le premier album, c’était en Allemagne dans un bunker souterrain. C’était une ambiance assez particulière, et puis on était en pleine galère. Ce sont des supers souvenirs. Le 2ème, c’était à Paris, dans des combles, dans un petit espace assez cloisonné.

Samaha : Et on peaufinait dans le bus ou dans les loges. On avait des cartes son, etc. C’était assez rigolo.

Ion : Il y a une certaine adrénaline, et une bonne ambiance. On sortait de scène et on allait se foutre dans le bus avec nos idées plein la tête qu’on mettait dans le disque dur. C’est vrai que ça a dû donner un truc plus festif et fun que les deux précédents albums.

Vous avez squatté les bunkers en Allemagne, qu’est ce que vous pensez de leur fermeture alors qu’il y a beaucoup d’artistes qui travaillent là-bas tous les jours ?

Ion : C’est dommage. On a quitté Berlin il y a 4 ans, et on y est pas beaucoup retourné depuis. Mais le peu d’écho qu’on a de là-bas, c’est que c’est en train de changer, et de se formater. Berlin, c’était vraiment à part, même par rapport au reste de l’Allemagne. Espérons que tout ce squatte et tous les gens qui étaient là-bas ont migré, et ont créé quelque chose d’autre ailleurs.

Samaha : C’est vrai que les squats sont des lieux de liberté artistique. Je trouve ça dommage  qu’ils ne soient pas aidés par l’Etat, plutôt que jetés, alors que c’est quand même de l’art. C’est de l’art de la rue, et je pense que c’est là que naît le meilleur.

Votre rapport à l’image vient du fait que vous êtes tous graphistes ?

Ion : Il y en a qui le sont plus que d’autres, qui font plus de choses que d’autres. Mais ça nous fait tous kiffer de participer à ça. Ceux qui ont plus de connaissances que les autres vont briefer les plus néophytes. C’est pareil pour la musique, il y en a qui ont plus de compétences en production, pour enregistrer les instruments comme il faut, et ils poussent les autres à le faire. Ce qui fait que ça devient super actif. Et des fois les moins compétents ont des résultats originaux. On a connu beaucoup d’accidents heureux, parce qu’on s’efforce de faire tout nous-même, surtout artistiquement, de la pochette du disque à la programmation PHP du site internet, ainsi que les clips, et les vidéos sur scène. Forcément, il y a des choses qu’on maîtrise mieux que d’autres. Très souvent, on a des idées en tête et à l’arrivée, ça n’a rien à voir. On essaie de faire que ça nous plaise quand même et que ça soit réussi.

Pour finir, quels sont vos projets ?

Ion : Pour l’instant, on finit la tournée des festivals d’été. C’était super cool ! On va continuer à faire pas mal de concerts cette année, surtout en France. Je pense qu’il y aura une réédition du dernier album, à la fin de l’année, avec sûrement un titre en live, ou un petit inédit, ce n’est pas encore décidé. Ainsi qu’un DVD, avec pleins d’images, des clips, des images de concerts, des vies du groupe, du singe, de pleins de choses… Et un Zénith le 25 novembre à Paris, il faut venir parce qu’il y a beaucoup de places à vendre ! On a vendu 7 places pour l’instant ! (rires)

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