« Téléchargez vos titres gratuitement et légalement ». L’introduction est accrocheuse. Quel utilisateur de Deezer ou Spotify ne s’est jamais senti frustré au moment de sortir de chez lui, en réalisant qu’il ne possédait pas le MP3 du morceau qu’il écoute en boucle en ce moment ? C’est finalement la grosse limite de tous ces sites d’écoute gratuite et légale : l’impossibilité de les emporter sur nos balladeurs.

Beezik a vu la faille, et tente maintenant de la combler. L’annonce de départ était plus qu’alléchante : télécharger des MP3, sans aucun DRM [[Digital Rights Management, terme anglais pour Gestion des droits numériques , la protection technique des droits d’auteur et de reproduction dans le domaine numérique.]], gratuitement et légalement. La seule chose demandée ? Visionner une vidéo publicitaire d’une dizaine de seconde. Et puis histoire d’aller encore plus loin, ils offriraient en plus des bons d’achats d’une trentaine de centimes d’euros (bon d’accord, avec ça, on ira pas loin, mais on vient déjà de récupérer un MP3 gratos, faut peut-être pas pousser). Pour enfoncer le clou, ils prévoient un lancement avec plus de 2 millions de titres à disposition (dont l’intégralité des catalogues EMI et Universal Music). Enjoy !

Le site a ouvert ses portes il y a quelques jours, il est donc temps pour Désinvolt d’y faire un tour afin de voir si Beezik est à la hauteur de ses promesses.

Direction Beezik.com pour un petit test.

Rechercher un titre ?

N’étant venu que pour tester, je n’ai pas de but précis, mais l’habitude prend le dessus, et c’est un « saez » qui se retrouve dans la barre de recherche.

Les résultats sont assez exotiques, pas un seul des 150 titres/albums/artistes proposés ne comporte le nom « saez ». Je retente alors le coup en limitant la recherche aux artistes correspondant, et cette fois, banco ! (ou presque, God Blesse, pourtant une production Universal n’est pas présent, mais soit).

Je clique sur un des titres au hasard (faut dire que c’est un peu le chaos, c’est ni trié par titre, ni par album… et pas moyen de le faire). Zut, il faut s’inscrire.

L’inscription ?

Email, prénom, mot de passe. Pour une fois on nous épargne la saisie de l’intégralité de notre curriculum vitae, et c’est pas plus mal. Ne reste qu’à récupérer l’email de confirmation, cliquer, et c’est fait.

Retour à ma recherche, on re-choisi un titre au hasard. C’est bon cette fois, passons aux choses sérieuses.

Le téléchargement ?

C’est assez marrant, mon titre est marqué comme « offert », il y a même la valeur (0,99 euros) ce qui laisserait penser qu’on peut aussi télécharger en payant (et donc en zappant la pause publicitaire), mais rien sur la page n’en donne la possibilité, ou que le nombre de téléchargement gratuit est limité, mais a priori non…

Arrivé là, on me demande de regarder un film publicitaire pour « patienter le temps du téléchargement ». 4 choix possibles : la bande annonce de Dancing girl, l’idNight (sans doute la version nocturne de l’idTGV), la nouvelle Ford KA ou le dernier Depeche Mode. Va pour Depeche Mode.

Une vidéo s’ouvre alors en plein écran. D’instinct, je me rabats sur mon deuxième écran et sélectionne une autre fenêtre histoire de m’occuper pendant la pub. Première erreur. Le film se coupe net, il faut reprendre, et cette fois veiller à ne pas donner le focus à une autre application. Bras croisés, mon regard fini par se diriger vers la fênetre et en oublie que la vidéo ne dure que 10/15 secondes. Seconde erreur. Après la visualisation, ils laissent à l’utilisateur 6 secondes pour cliquer sur la page et lancer le téléchargement. Sans quoi ils considèrent qu’on a pas regardé la vidéo ou nous font reprendre au début. Je m’exécute, pense à cliquer à temps, et à moi le MP3 !

L’écoute ?

C’est là qu’intervient la grande surprise ! Au lieu d’un MP3, on m’a donné un WMA [[Windows Media Audio est un format propriétaire de compression audio développé par Microsoft. Le format WMA offre la possibilité de protéger dès l’encodage les fichiers de sortie contre la copie illégale par une technique nommée gestion numérique des droits.]], format propriétaire Microsoft. J’avais bien vu passer un message, me conseillant d’utiliser Windows Media Player [[Le Windows Media Player est un lecteur multimédia propriétaire produit par l’entreprise Microsoft qui permet de lire des fichiers audio, vidéo, et des images sur les ordinateurs fonctionnant à l’aide du système d’exploitation Microsoft Windows. Des versions du Lecteur Windows Media pour les systèmes d’exploitation Mac OS et Solaris ont également vu le jour mais leurs développements ont été interrompus depuis.]]… Je savais que j’aurais du me méfier !

J’ai tenté avec tous les players pré-installés sous mon Macbook et mon Archlinux, mais rien n’y fait. Impossible de lire ce fichu fichier. Après renseignements auprès d’un ami sous Windows, il semblerait que Windows Media Player demande la validation d’une licence Beezik.

De la même facon, impossible de le lire sur mon balladeur MP3 ou sur mon téléphone. D’après le site de Beezik, il est nécessaire d’utiliser une nouvelle fois Windows Media Player pour le transfert et d’avoir la chance de posséder un balladeur compatible.

Les bons d’achats ?

C’est un système de point qui est en place. On m’en a donné 2500 pour mon inscription, puis 30 pour le titre téléchargé. Ces points peuvent ensuite être convertis en bons d’achat vers des marchants partenaires.

2500 points me donnent droit à 25 euros (avec ou sans minimum d’achat selon les partenaires). On est donc bien dans le ratio annoncé, 30 points pour un morceau qui équivalent à 30 centimes.

Autant les 25 euros de départ sont sympas, autant les 30 centimes suivants me semblent juste inutiles.

Beezik, la révolution ?

Pas vraiment. Beaucoup d’espoirs décus. Un site qui exclut d’office tous les utilsateurs venant de Linux ou Mac, et plus encore : les iPods vu qu’iTunes n’est pas compatible avec les DRM présents dans les fichiers WMA. Dans ces conditions, difficile d’imaginer que le truc puisse prendre…

Le plus étonnant reste le contraste avec l’annonce initiale (des MP3 sans DRM). Intox pour créer du buzz ? Ou serait-ce les majors qui les auraient obligé à retourner leur veste ?

Au delà de cet aspect, le reste n’est pas vraiment mieux. Le téléchargement se fait obligatoirement piste par piste : pour télécharger un album de 10 titres, il faut donc se taper 10 pubs. Je n’ai pas trouvé la possibilité de payer un petit quelque chose qui permettrait d’être moins limité.

Ce n’est donc pas Beezik qui va révolutionner le monde musical, que se soit en offrant une alternative légale et gratuite au téléchargement illégal, ou en faisant concurrence aux offres de téléchargement légales (et payantes). Le site est encore en version Bêta [[Le test bêta est la deuxième période d’essai d’un produit informatique avant sa publication. Un produit en période de test bêta est généralement soumis à un nombre important ou représentatif de personnes. Ces personnes ont pour but d’utiliser le logiciel et de rapporter les problèmes rencontrés ainsi que leurs suggestions.
Le but de cette phase est d’implémenter toutes les fonctionnalités du logiciel final. Le test bêta sert essentiellement à trouver des bogues résiduels, ou bien à modifier l’interface utilisateur.]], mais il y a fort à parier que s’il reste dans cette logique, il sombre dans l’oubli rapidement.