Danakil c’est un voyage rempli de vie de partage de paix et d’espoir …Pourquoi avoir choisi ce nom ?

Ce nom est venu un peu par hasard, à nos débuts notre première date est arrivée plus tôt que prévu, on a donc du trouver un nom en urgence. Par réflexe on a ouvert le dico à « Ethiopie », il y avait marqué Danakil sur la carte, ça nous a plu. Après on a su que c’était le nom d’un désert qui serait un des endroits les plus chauds de la planète et également le nom d’une tribu éthiopienne. Maintenant le choix s’est vraiment fait sur la phonétique.

Pouvez-vous revenir en bref sur le parcours de votre groupe ?

On s’est connu pour la plupart au lycée, on a commencé à jouer après le bac en 2001, il y a eu différents changements dans le groupe. La formation actuelle existe depuis 3 ans maintenant, avec un album (Microclimat sorti en 2006) et une bonne centaine de dates ces deux dernières années. La sortie de Microclimat en 2006 était un peu un pari puisqu’on s’est lancé sans aucune certitude, même pas celle d’être distribué. Aujourd’hui on est plus expérimenté à tous les niveaux : musicalement mais aussi au niveau de la production, de la distribution, du booking et de la promotion avec nos nouveaux partenaires (Xray qui s’occupe de promouvoir le groupe autour de la sortie de ce nouvel album et Musicaction du booking).

J’ai entendu dernièrement parler de Danakil Sound System. Pouvez vous nous donner un peu plus de détail la dessus ?

Notre chanteur, Balik, va de temps en temps réaliser des petites tournées, avec un DJ. Ils vont dans des endroits où l’on ne peut pas se produire avec le groupe (à la montagne…ce n’ est pas facile de voyager à 11!) Cela permet de faire vivre notre musique dans des endroits ou cela n’aurait pas pu être le cas sans la version « Sound system » du groupe.

Vous vous démarquez des groupes de la scène reggae française par vos paroles mais aussi par l’énergie que vous dégagez sur scène, c’est ce qui vous a aidé à vous forger votre propre identité ?

Notre identité c’est plus la somme de toutes nos identités, on ne s’est jamais vraiment dit on va faire comme ci ou comme ça… Bon c’est sur que sur scène on aime bien quand ça claque mais plus on progresse plus on se rend compte que le « groove » ce n’est pas nécessairement une question d’énergie. Quoiqu’il arrive, quand tu fais les choses de manière authentique, il y a forcément une partie de toi qui transparait que ce soit dans les textes ou dans la musique. Sur la scène reggae française beaucoup de groupes comme Broussai ou Funde ont une identité forte.

Les textes de Balik jouent un grand rôle dans le succès de Danakil aujourd’hui. Comment vous définissiez votre musique ? Du reggae « engagé » ?

Engagé ce n’est pas un terme que l’on affectionne particulièrement parce que c’est un peu réducteur. Ce qui compte c’est la sincérité, si tu écris un texte sur un thème particulier il faut qu’il te tienne à cœur, si tu le fais parce que ça fait reggae d’être « engagé », il y a beaucoup de chances pour que ça sonne faux. Mais tu sais beaucoup de textes peuvent être engagés, une chanson d’amour comme des chansons plus sombres sur l’actualité ou l’histoire, ce qui compte c’est l’intention que tu mets dedans et l’émotion qui en ressort.

En restant dans cet engagement, Danakil s’investit-il dans des associations ?

Non, ou alors indirectement. On gère tout ce qui nous concerne quasiment, sans arriver à vivre de la musique ce qui fait qu’en plus des répèts, des nombreux concerts, on a tous un taff pour vivre. On a vraiment pas le temps de s’investir dans autre chose, en revanche on répond très souvent à l’appel d’associations qui organisent des concerts, pour l’instant on ne peut pas faire beaucoup plus.

Avec les textes de Balik qui s’inspirent de l’actualité ou de la vie tout simplement, quel message avez-vous voulu faire passer?

La réponse est dans la question, c’est la vie tout simplement, telle qu’on la perçoit avec nos yeux, nos oreilles et notre vécu à nous. On n’a pas la prétention d’avoir des vérités à dire ou des leçons à donner.

Ne vous sentez-vous pas des fois que des simples témoins qui partagent avec nous leur propre vision du monde sans nous donner vraiment de solutions ?

C’est évident… D’autant plus que la majorité de notre public est déjà sensibilisé à pas mal de sujets donc nous prêchons des convaincus pour ainsi dire… On ne s’est jamais dit non plus qu’on allait changer le monde, être des témoins et partager des expériences, faire des rencontres c’est déjà être privilégié de nos jours.

Danakil toujours indépendant, toujours autoproduit ! Vous êtes conscient que pour un groupe Autoproduit c’est beaucoup plus dure d’aller vers le « grand public » et malgré cela, « Dialogue de sourds » a été réalisé en autoproduction. Pourquoi ce choix ?

Pour Microclimat ce n’était pas vraiment un choix mais plutôt une obligation ! Pour ce second album c’est vrai qu’on a pas fait trop de démarches pour être signés…en même temps personne ne s’est précipité vers nous non plus ! De toute façon, un groupe comme le notre a beaucoup plus intérêt à trouver un bon tourneur pour faire des dates et obtenir le statut d’intermittent…

Jah Mason, General Levy ainsi que Mighty Diamonds ont participé à l’élaboration de votre dernier album. L’implication de ces grands noms a-t-elle été importante pour vous ? Et comment s’est passé la réalisation de cet album?

C’est sur que ça fait très plaisir que des grands noms aient accepté de participer à ce projet, et puis en plus de la vibe qu’ils mettent à l’album, ça donne vraiment une envergure plus importante au disque. Pour ce qui est de la réalisation de l’album, une moitié des morceaux a été composée entre la sortie de Microclimat et l’été 2007, l’autre moitié a germé lors d’un séjour d’une semaine en Normandie cet été. On a enregistré une maquette en septembre, peaufiné les morceaux jusqu’en janvier et après on a mis tout ça dans la boite… C’est d’ailleurs l’occasion de rendre hommage à Damien notre ingé son live qui s’est occupé des prises en studio et qui a du frôler l’overdose sonore ! En plus des featurings dont tu as parlé, on a aussi des amis qui sont venus mettre leur patte sur certaines tunes (percus, violons, flute traversière, claviers…) ainsi qu’une section chœurs … Au final ça donne un album bien plus dense que le premier où tout a été mieux réfléchi et maitrisé…

« Dialogue de sourds » est-il fidèle au style revendicatif et engagé qui a fait le succès de « Microclimat » ? Et quels thèmes avez-vous abordé dans cette fois ci ?

Comme on disait toute à l’heure, ça vient du cœur !… donc forcément tu devrais percevoir des similitudes dans le style entre ces deux disques… On a accumulé pas mal d’expériences ces deux dernières années et on a vraiment muri aussi bien musicalement qu’au niveau de l’écriture. Pour ce qui est des thèmes abordés, il s’agit véritablement d’une photographie du monde à un instant donné avec ce qu’il comporte d’inégalités…mais pas seulement. Une fois de plus on ne peut pas se limiter à être « engagés » parce que la vie ce n’est pas que le combat ou la revendication, c’est aussi de belles histoires… D’ailleurs sur cet album il y a un titre, « les vieillards », qui a été écrit par le père de Balik il y a quelques années, c’est une belle histoire, hors du temps…

Au niveau musical, comment vous compareriez cet opus par rapport au précédent « Microclimat » ?

On en a déjà un peu parlé, si l’ensemble reste résolument « reggae », je pense que l’on commence à plus s’affirmer et cet album est plus varié que le précédent. La qualité de la production est bien meilleure que pour Microclimat, expérience oblige on n’a pas commis les mêmes erreurs et on a su prendre notre temps. On a eu la chance de pouvoir enregistrer dans un excellent studio (wendogennet production à carrières sur seine) qui nous a vraiment laissé le temps de travailler. A l’écoute on sent que le groupe a franchi un cap important.

Des artistes comme Brahim, Broussai ou encore Maxxo me font autant vibrer au niveau de la voix que n’importe quel autre artiste jamaïcains ou anglais. Et Danakil fait parti de ceux là aussi pour moi. Balik a un charisme de fou et une voix totalement envoutante. Serait-il un peu exagéré de dire que Danakil doit l’essentiel de son potentiel à son chanteur ?

Quel que soit le style de musique, tu ne peux pas espérer percer avec un mauvais chanteur…Et c’est normal, c’est l’interface avec le public, que ce soit sur scène ou sur disque, beaucoup de gens n’entendent que le chant. C’est sur qu’à ce niveau là on n’est pas à plaindre, parce que des groupes carrés on en croise des tas mais c’est souvent au niveau du chant que ça pêche. Maintenant derrière il y a un groupe carré et créatif mais il ne faut pas se voiler la face, à part Groundation, aucun groupe de reggae n’est connu pour la qualité de ses musiciens, c’est la plupart du temps le chant qui retient l’attention. Après le travail d’un groupe c’est de contribuer à créer un univers musical particulier

Un concert de présentation du nouvel album « Dialogue de Sourds » aura lieu à Marly le Roi le 31 mai 2008. Avez-vous une histoire très forte avec votre ville Marly le Roi, et qu’est ce que ça représente pour vous ?

Ben… c’est chez nous ! On joue devant les amis, la famille etc… Ça nous fait donc particulièrement plaisir !!

Vous avez effectué énormément de tournées, partagé des scènes avec les plus grands, de Tonton David à Sizzla, y a t-il eu des rencontres marquantes ?

Nous aimons beaucoup partager des scènes avec les grands noms du reggae. Nous apprenons beaucoup, à chaque fois. Maintenant, parfois, cela se passe mieux que d’autres…( Mais ça c’est secret !) En ce qui nous concerne, les rencontres les plus « riches » sont souvent celles avec des groupes d’envergure similaire à la notre, avec qui on partage les fins de soirées etc…

Sinon pour ne pas poser une question assez basique sur votre avis sur le téléchargement, imaginez que vous tombez sur un site qui propose en libre téléchargement tous vos lives (à l’instar de notre site www.saezlive.net), vous vous opposerez à ce genre de pratique? Et Qu’elle serait votre réaction si on vous demande de signer un de vos skuds « gravés »?

Haaaaa….l éternel dilemme du téléchargement !!;) En ce qui nous concerne, on est ce que nous sommes aujourd’hui, peut être grâce à Internet…Cela permet à beaucoup de monde de nous découvrir. Après, c est vrai que pour un groupe de dix personnes, le fait de ne plus vendre de disque, nuit beaucoup à la viabilité du groupe. On doit cumuler petits boulots, repets, concerts etc.…et ça c n’est pas tous les jours facile !

Maintenant, pas de problèmes pour signer un Cd gravé ! Le prix des Cd reste trop élevé. C est sans doute la raison première au téléchargement illégal.

On entend souvent dire que la mort du disque est due à Internet. Ne serait ce pas plutôt la faute aux majors qui tuent les petits groupes, pour miser que sur ceux qui à leurs yeux « vont rapporter gros »?

Non, beaucoup de petits labels sont financés par des majors, ce qui est certain c’est qu’à l’heure d’aujourd’hui si internet permet de faire éclore plus vite certains artistes, il y a un manque à gagner certain quand aux ventes de disques et il n’y a pour l’instant par de réelles alternatives proposées aux auteurs/compositeurs par rapport aux piratages de leurs œuvres. Il faut quand même garder en tête qu’avant la généralisation du téléchargement, un groupe comme Sinsemilia avait réussi à vendre plus de 100000 exemplaires de Première Récolte, leur premier album autoproduit, aujourd’hui ça ne serait pas possible.

Merci Danakil et à très bientôt sur scène