Le Théâtre, rue de la Folie Méricourt, nous offre une adaptation contemporaine, musicale et dansante de Huis Clos. Le classique de Sartre est revisité par Anne-Lore Leguicheux, une talentueuse metteuse en scène, créatrice et comédienne, et par La Compagnie Les Yeux Qui Sonnent. La pièce commence rideau fermé, sur une mélodie entraînante, jouée par des musiciens que l’on devine derrière le velours rouge.

Le rideau s’ouvre : côté cour, quatre musiciens pour un accordéon, une guitare, un violoncelle, une trompette et un piano, ainsi que trois danseurs sur le devant la scène dans une pièce drôlement aménagée, entre un canapé Second Empire, un fauteuil aux arabesques de femme, un porte-manteau, et au fond de la scène, une tête de cerf en bronze, un aquarium et un frigo tout droit sorti des sixties.

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Quand entre, côté jardin, le premier comédien, les musiciens arrêtent de jouer et retournent vaquer à leurs occupations de tricot, Rubik’s Cub et banane. L’intrigue commence, le public se tait.

Nous voilà partis pour une heure et demie d’un spectacle mêlant absurde, fantastique et vérités, qui nous tient en haleine, entre le (sur)jeu des comédiens qui provoque autant d’éclats de rire que de frissons au sein du public et les arabesques tracées par les danseurs, doubles machiavéliques des trois personnages confinés dans cette anti-chambre des damnés. Sous les yeux amusés des musiciens de connivence avec le garçon d’étage, Inès (Anne-Lore Leguicheux), Garcin (Ronan Cavenne) et Estelle (Hélène Bondaz) se questionnent sur la raison de leur réunion au sein de cette pièce sans lit et sans issue, loin de l’image de l’enfer qu’ils avaient conçue. Pour quelles raisons ont-ils été réunis tous les trois ?

Chacun se dévisage, s’observe, se questionne et imagine le monde, là-bas, sans eux. Que pensent-ils d’eux désormais, que deviennent-ils dans la mémoire de ceux qui restent ? Des scènes du monde des vivants leur apparaissent successivement derrière un rideau blanc, ombres fantomatiques du monde qu’ils ont quitté. Les musiciens sortent de l’observation et jouent une musique pour chacun des personnages, qui n’est pas sans rappeler l’univers de Jean-Pierre Jeunet. Inès nous régalera d’une interprétation très personnelle de la chanson La Rue des Blancs-Manteaux. Valse, charleston, ballade à la guitare, au piano, illustrés par les pas de danse contemporaine des trois consciences des personnages, offrent une vraie symbiose à la pièce et accompagnent le spectateur vers l’avènement de chaque personnage aux aveux.

Une pièce pleine de vie, en enfer, à découvrir jusqu’au 7 novembre 2015.

Photos © OdreyKnight.

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