Il a fallu un peu de temps pour digérer ce qu’on avait vu ce soir là. Presque un mois. Il n’est pas dit que les mots rendent vraiment compte de ce qui a été proposé. Il en reste l’impression d’avoir assisté à un tournant crucial dans la carrière de l’artiste.

Les lumières s’éteignent à 20h pour accueillir IAMDDB. La chanteuse, originaire de Manchester, entre sur scène dans un élégant costume gris. Le col, très échancré, laisse apparaître un soutien-gorge rose fluo. Le contraste entre les deux vêtements donnera l’occasion de très bons jeux de scène, entre retenue et séduction démonstrative. L’artiste ouvre la soirée en douceur avec un style entre urban jazz et alternative R’n’B. On touche un peu à la trap avec les morceaux du dernier album Hoodrich Vol.3 et son titre phare Shade qui ambiance bien le public. La scène est très peu investie. Le DJ est posté juste derrière la chanteuse, ce qui lui permet une participation plus active au set et quelques moments de dialogue assez drôles. IAMDDB assure une bonne première partie qui met en jambe le public pour l’arrivée de celle qu’elle nous présente comme : « Christine motherfucker Queen« .

On rentre directement dans le vif du sujet. La scène s’éclaire et le titre Comme si on s’aimait démarre. L’artiste, cheveux courts, chemise rouge ample, baskets aux pieds, entre sur scène comme sur un ring, accompagnée de sa clique. On est devant un gang, composé des dignes héritiers de West Side Story. Six danseurs et quatre musiciens vont se relayer auprès de Chris tout au long des différents morceaux. Chaque chanson donne un prétexte à la mise en scène d’un tableau, ou d’une scène de théâtre classique dont les danseurs sont les interprètes privilégiés. Les morceaux s’enchaînent avec fluidité, chaque interlude étant ponctué d’une anecdote et d’un échange avec le public (d’une sincérité parfois désarmante).

La prestation est généreuse. Les instrumentations variées permettent de donner une nouvelle ampleur aux morceaux. On se laisse prendre par le solo de guitare sur Le G, ou la relecture électro de Science Fiction. Les danseurs ont la part belle, bénéficiant de plages instrumentales pour eux seuls. En décor une toile de fond évoque un paysage montagneux, une mer déchaînée, puis les lumières prennent le relais. Le public s’enflamme sur 5 dols puis s’émeut sur Machin chose. Le morceau, tout en intensité sensible, est magnifiquement mis en lumière et donnera lieu à l’un des plus beaux moments d’émotion du concert. On peut saluer la qualité du son gérée d’une main de maître. Le spectateur peut à la fois apprécier le dynamisme de certaines chansons et les passages plus intimistes sans souffrir de trop de basses ou d’aigus.

On reste scotchés par la fin du morceau Here, porté par les samples de la voix Booba. Chris fait tomber la chemise et offre son dos au public, pour une sorte de Boléro musculeux. Les images sont puissantes et l’artiste en maîtrise la poésie. Les instants sont mis en scène pour n’en tirer que l’essence que l’artiste veut partager avec son public. Le drap qui servait de fond de scène disparaît, des confettis tombent du ciel et une lumière verte accueille Goya ! Soda ! la danseuse qui l’accompagne part en fumée. Follarse donne lieu à un interlude hip-hop et un mash-up avec Nasty de Janet Jackson. Puis, Nuit 17 à 52 nous offre une nouvelle plongée dans l’émotion. Elle propose au public de frapper dans les mains et de l’accompagner en chantant. C’est alors toute la salle qui prend possession du morceau et le rend à l’artiste, seule sur la scène centrale. Man in the Mirror de Michael Jackson permet la transition vers Doesn’t Matter suivi de La Marcheuse qui clôt le set. Le public a droit à un rappel chanté depuis la fosse, que l’artiste traverse sur Saint-Claude. Chris n’a pas envie de partir et le chante. Elle termine sa prestation avec une version electro-dance du titre Intranquilité, sous une pluie de confettis, qui laisse la salle vêtue d’un sourire heureux.

Chris, alias Héloïse Letissier, se montre à la fois minuscule et immense, accessible et intouchable, douce et virile. Elle montre qu’elle peut tout autant être une grande fille qu’un petit garçon. Chaque mouvement, orchestré au millimètre, reste d’une spontanéité touchante, presque inadaptée parfois. À voir défiler les chorégraphies, les moments plus intimistes, les échanges avec le public, on s’interroge. Le personnage de Chris ne serait-il pas une chrysalide dans l’attente d’une future transformation ? Le potentiel est là et elle lancera le doute dans le public en fin de set en quittant la scène sur : « A bientôt pour la prochaine transformation, ma gueule« . Chris est sans doute déjà devenu quelqu’un d’autre, là ce soir, sous nos yeux.

Setlist CATQ

  1. Comme si on s’aimait
  2. Damn, dis-moi
  3. Le G
  4. Science Fiction
  5. Paradis Perdus
  6. It
  7. Feel So Good
  8. Christine
  9. 5 dols
  10. Machin-chose
  11. Here
  12. L’étranger (voleur d’eau)
  13. Goya ! Soda !
  14. Follarse
  15. Nuit 17 à 52
  16. Doesn’t matter
  17. La marcheuse

Rappel

  1. Saint Claude
  2. Intranquilité

Photos © Dody.
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