Le mardi 27 juin 2017, nous étions à la Gaîté Lyrique dans le cadre du festival Paris Hip-Hop 2017. Sur scène Marie Sonnette, maîtresse de conférence en sociologie, spécialisée dans l’engagement politique des rappeurs en France, Alice Aterianus-Owanga, anthropologue spécialisée dans le hip-hop et les pratiques musicales urbaines au Gabon, Eloïse Bouton, fondatrice du site Madame Rap, journaliste et militante féministe et Chilla, artiste rap. La conférence proposée s’attaque à plusieurs questions et entend donner un aperçu de la place des femmes dans le rap, entre domination et transgression. Je vais tenter de vous donner un aperçu de la soirée.

Marie Sonnette ouvre le débat qui s’organise autour de la question du genre dans le rap, souvent considérée comme une musique d’hommes, sexiste par essence. Elle souligne qu’une part de réalité colle à cette image. En effet, les paroles machistes ne manquent pas. On a en mémoire le Sale Pute d’Orelsan ou encore Ma Salope à Moi de Doc Gynéco. Dans les faits, il faut souligner que moins de 5% des artistes de rap sont des femmes. On constate une faible présence des femmes dans la publication d’albums. Seulement deux rappeuses ont un album disque d’or : Diam’s et Keny Arkana. Sont cités l’enquête de Marie Buscatto : Femmes du jazz. Musicalités, Féminités, Marginalités, et le travail de Hyacinthe Ravet intitulé Musiciennes : Enquête sur les Femmes et la Musique. Ces ouvrages permettent de mettre en perspective le discours tenu sur le rap. Celui-là reste un genre musical qui appartient à une société où les femmes ont une place dédiée, où elles occupent souvent une position de dominées dans le monde professionnel.

Marie Sonnette expose les raisons qui font du rap une musique plus marquée par cette situation, et pourquoi les médias grand public parlent plus de sexisme dans le rap. Elle évoque Karim Hammou, pour qui le rap est une modalité d’expression considérée comme minoritaire par les médias. Le rap est souvent assigné à la figure du jeune homme de banlieue racisé. C’est l’image la plus répandue, mais elle n’est pas forcément vraie. Elle tire son origine d’une certaine stigmatisation dans un milieu néo-colonial. En effet, dans ce cadre, les sexistes seront toujours les autres. Cela fait partie du « packaging » du rap. Marie Sonnette propose une réflexion plus intersectionnelle, appréhendant les rapports de domination de classes, de genres, de races. Elle termine en s’interrogeant sur la nature des pratiques féminines et féministes dans le rap. Le rap est également un mouvement émancipateur, à l’image du titre UNITY de Queen Latifah ou de certains titres de Casey. Elle souligne qu’il existe une pluralité d’acteurs dans le rap, plus ou moins féministes, plus ou moins sexistes, ainsi que l’intérêt de faire connaître ces pratiques émancipatrices. Elle termine son allocution en citant les paroles du morceau Le Procès, titre de La Rumeur : « Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse ne peuvent que chanter la gloire du chasseur« .

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