Consternation l’autre jour au bureau. J’entre, le sourire rayonnant, brandissant à la main le rose objet de mon contentement, je le montre aux collègues, fier de posséder ce nouvel album en ce jour bénit de sa sortie… c’est alors que j’entends: «Mais euh, c’est quoi ça la Rue Kétanou?», quand un autre déçu: «ah… mince, je croyais que c’était le nouveau U2».

Que Bono me pardonne de n’être fait pour lui, mais c’est bien le quatrième opus des trois gouailleurs musettés, A Contre Sens, qui anime ma curiosité et apaise ma soif de nouveautés. Et le premier sentiment est qu?Olivier, Mourad et Florent n’ont pas changé! Si les chansons ne rappellent pas directement les précédentes, 5 ans après le live Ouvert A Double Tour, le style est toujours là. Enrichi des différents projets perso, T?inquiète Lazare ou Mon Coté Punk, Le groupe nous revient avec ses guitares rythmées, son accordéon dansant, ses airs tziganes, ce goût de la rue, ces histoires qui sautillent, qui se révoltent, qui pleurent, qui vivent. La rue Ket? est bel et bien de retour, ouvrez grand les oreilles, et tapez dans vos mains. De La Rochelle au monde entier, à savourer !


Si Maître Corbeau, sur son arbre perché, voulait partager son fromage…

Cet album A Contre Sens est donc sorti ce dernier mois de Février, trop longtemps après l?opus précédent, et c?est avec quelques inquiétudes que je l?attendais. Et si la magie s?était brisée ? Etouffée par des égos gonflés aux succès passés ou par une maturité triste et blasée? Doutes vite dissipés par les accents espagnols de la première chanson Todas las Mujeres, quelques notes, à peine quelques mesures, et dèjà plus qu?une envie, retourner les voir en concert.

Gros plan d?abord le troisième titre, un rap?n roll pour les connaisseur, Maître Corbeau, ouared, jouge, du saccadé, du débridé, du rap musette sans originalité certes, mais réussi. Textes engagés au refrain percutant, appel à la générosité, ça sent un peu le poing levé par l?ado défoncé dans les fosses de festival? et alors ? Le fromage comme un camenbert, graphique de la redistribution des profits, et l?actionnaire, tranquillement perché, bien à l?abris des affamés, a bien la robe noire et l??il de mort du corbeau.

Prenons la vie, comme elle vient…

On repose nos fesses deux chansons plus loin, pour se mettre à les secouer, sur ce qui reste sans doute comme le titre accrocheur, accompagné au didjeridoo, un Prenons La Vie qui vous fera bouger, dès que l?accordéon aura pris position, un morceaux à prendre comme il vient, aux faux airs de Danse (sur l?album Y A Des Cigales Dans La Fourmilière). De l?amour, de l?ivresse, à reprendre en soirée entres copains !

Il y aussi la coquine Elle Est Belle, description sensuelle envieuse d?un amour futile et passager, à vouer un culte à ses fesses ou à ses yeux de papillons. Une Germaine qui a le courage de refaire sa vie, une non-promesse comme un aveu de faiblesse, Je Peux Pas Te Promettre comme un échappatoire, comme une excuse, comme une fuite, plutôt que de prendre le risque de s?engager.

On s?arrêtera sur la fin Derrière Ses Cheveux Longs, témoignage poignant, non sans rappeler La Fiancée De L?eau, grave, pertinent, sur une réalité sur laquelle il ne faut plus garder les yeux fermés, s?adressant à l?inconnu, celui là justement, celui qui a osé l?horreur. S?en suivent un Revenir du Lointain plutôt électrique, et enfin Les Derniers Aventuriers, comme une conclusion relevée, à contres sens des frontières et des retours en charter, encrée dans le présent, assaisonnée à la désespérance.

Rien que pour la beauté de leur geste…

C?est en tout 14 chansons, certaines déjà découvertes lors des dernières tournées, que nous offres la Rue kétanou pour ce retour attendu par beaucoup d?entre nous, totalement ignoré des autres, qui n?y ont pas encore gouté. Un grand merci donc à La Rue Kétanou, quelques gouttes de fraicheur dans la moiteur ambiante. De l?évasion, de l?entrain, que du bonheur, allons taper dans nos mains ! Rien que pour la beauté de leurs gestes?

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