I Need a Dollar. A moins que vous ne viviez dans la forêt amazonienne ou que vous ayez décidé de tout plaquer pour aller méditer sur vous-même dans les montagnes de l’Himalaya en compagnie de moines bouddhistes, vous n’avez pas pu passer à côté de ce titre qui tourne depuis déjà 4 mois sur les ondes. I Need a Dollar réapproprié au passage par HBO pour sa série How To Make It In America, débute avec trois notes jouées au piano et une rythmique hip-hop pleine de groove où le jeune chanteur Aloe Blacc (ancien rappeur au sein de la formation Emanon) vient poser sa voix. D’un minimalisme tellement charmeur et envoûtant que le morceau a fait partie des tubes de l’été et a hérité d’une large diffusion radiophonique. C’est à cela que l’on reconnaît les grandes oeuvres. Lorsqu’avec peu, elles arrivent à évoquer beaucoup à celui qui s’y abandonne.

Good things est sorti le 28 septembre 2010. Pur disque de soul music, ce second album – le premier, Shine Throught sorti en 2006, s’orientait plus vers le New Jack Swing avec encore quelques restes de son passé hip-hop – tente en 11 titres originaux et 2 reprises (Femme Fatale du Velvet Underground et Politician) de confirmer le succès de I Need A Dollar et ainsi prouver au plus grand nombre qu’Aloe Blacc n’est pas qu’une étoile éphémère dans l’horizon musical, destinée à s’éteindre.

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Et la tâche n’est pas aisée lorsque l’on s’arrête un peu sur le récent revival porté à la Soul ces derniers temps chez nous et surtout chez nos voisins british depuis les années 2000. Les responsables en questions : Amy WinehouseJoss Stone, Duffy, Krystina MylesJohn Legend, Wayne BeckfordPlan B et cocorico !… Sly Johnson et Ben L’Oncle Soul. Toute une nouvelle scène soul qui a su moderniser le style, en le métissant, le rendant plus urbain et ainsi, toucher un plus large public. Des noms aujourd’hui entrés dans la mémoire collective et qu’il est difficile de ne pas citer lorsqu’un petit chanteur fait son apparition. Alors qu’est-ce qu’Aloe Blacc rapporte de neuf à se mettre sous la dent à la table de ces nouveaux apôtres ? Il est clair que le terrain a été largement préparé pour le recevoir comme il se doit avec ce premier single. A l’instar de ses adversaires, Aloe Blacc a donc décidé de jouer la carte, non pas du modernisme mais celle du « back to the roots ». Un retour aux racines assez inattendu de la part de l’ancien rappeur. Alors que l’anglais Plan B n’arrivait pas encore à se débarrasser de son passé de MC white trash sur The Defamation of Strickly Banks, Aloe Blacc en fait totalement abstraction et cherche l’inspiration du côté de Bobby Womack et Marvin Gaye.

Le Funk, le Jazz, le rythm’n’blues… le soulman originaire du Panama et résidant aux Etats-Unis annonce son retour aux  « bonnes choses ». Celles qui ont alimenté sa passion pour la musique et qui ont traversé l’histoire de la musique noire depuis les années 50. Car si Aloe Blacc s’est attelé à ce style, c’est qu’il est pour lui, le meilleur moyen qu’il ait trouvé pour enfin faire passer son message. Pour trouver une oreille attentive à son discours. Le rap, ça va cinq minutes !

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Si les artistes cités plus haut livrent eux aussi de la soul music à pleurer, dans Good Things, son interprète tient aussi à toucher les consciences de son auditoire et délivrer à travers ses chansons, un message social et politique. La pauvreté, le chômage et la misère sociale en Amérique, Aloe Blacc chante tout ça avec une émotion palpable et une sincérité touchante, lui qui s’est fait remercier après plusieurs années passées dans le domaine de la santé comme consultant. Une approche de la soul qui rappelle les thèmes abordés dans le blues mais aussi, et plus récemment dans un album, What’s Going On, l’album de la révélation de la conscience sociale de Marvin Gaye. Autant dire que cela fait un moment déjà que l’on avait pas eu droit à un disque de cette trempe ! Ici, tout est maîtrisé, aussi bien l’émotion que la partition, Aloe Blacc ne laisse rien au hasard et dans sa musique s’installe alors un équilibre et une tonalité toute particulière. Hey Brother, Femme Fatale, If IMama Hold My Hand auraient très bien pu être écrites en 1965, l’époque où Otis Redding sortait Otis Blue, on y aurait vu que du feu. Et pourtant aujourd’hui, ces chansons jouées au milieu de ces personnes au quotidien morne, dans ces rues froides, grises, et devant les tours des immeubles, sonnent différemment. Elles sont en parfait accord avec leur temps. Et ça, c’est quelque chose que les apôtres autour de leur table n’avaient pas vu venir…  Quelqu’un comme le messie.

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